Contrôler ses sentiments ? Circoncire ses émotions ?

Contrôler ses sentiments ? Circoncire ses émotions ?

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Amour, PhiloSex

17 Jan 21

A l’heure où je me propose d’ouvrir ce débat, je ne sais pas encore bien où il me mènera. C’est encore un TP qui aura changé la donne, qui m’aura permis de me perdre doucement et de façon truculente dans les méandres de la réflexion quand elle se prend les pieds dans le tapis de la vie 😏

Je partais du principe que les émotions étaient toujours bonnes à vivre : elles nous permettent d’explorer des zones inédites de notre personnalité, elles nous complètent à la manière d’un jeu de memory*, découvrant ainsi tour à tour ces cartes face cachées vers l’intérieur. Mais il est une autre vérité que je découvre aussi, celle de choisir, de diriger ou de circoncire ses émotions amoureuses évitant ainsi l’écueil et la souffrance.

Mon exemple : Je rencontre Dani et assez rapidement je me rends compte que mon cœur se pince alors qu’il s’évoque en moi… Surprise (ça faisait longtemps que mes sens n’avaient pas été ainsi secoués), je me laisse aller à cette sensation. J’explore ses effets sur les différentes parties de mon corps et de ma psyché, je rêve, j’extrapole, je projette. Un monde se crée. Où il n’est pas réellement, mais potentiellement. Bientôt il est partout, il m’accompagne partout, je vis au rythme de ses messages et de nos rares échanges. Je commence à sentir aussi cette frustration, ce manque de lui, mais je DÉCIDE de garder en moi cette douceur amoureuse, ce potentiel, même s’il est encore inexploité, je le prends avec sa frustration corollaire. Je suis encore capable de l’accepter.
Évidemment, je ne vous fais pas un dessin, ça a duré des mois, j’ai fini par me prendre un râteau, ce qui m’a rendue encore bien malheureuse pendant des semaines. Pas de conclusion à ce stade (mais je ne veux plus souffrir).
Puis je rencontre Sergí. Un pari. Quelques échanges rapides sur l’application, on décide de s’appeler (400 km nous séparent). Son profil titillait mon parcours, et j’étais curieuse de connaître de l’intérieur ce mode de vie nouveau pour moi : Sergí est en couple depuis vingt ans, il me raconte son aventure, l’évolution, les difficultés, les bonheurs de son union aujourd’hui libre. Je lui fais part de mes découvertes, mes peines et mes joies dans mes nouveaux rapports aux autres. Une heure d’échanges enlevés et très agréables. On a envie de se voir. Je décide de profiter d’un week-end pour rendre visite à un ami dans sa ville quelques semaines plus tard. Je rajoute un jour pour le passer avec Sergí. Il vient me chercher à l’aéroport, on va prendre l’apéro, on se ballade, on va déjeuner. On rit. On est un peu éméchés, on se regarde, on se touche, on cherche un hôtel. C’est top. Une après midi pleine de joies, délices, pleine de vie.
C’est là que s’ouvrent à moi deux chemins possibles, qui commencent pareil :
- C’était vraiment bien… Je sens que mon cœur se pince, je me laisse envahir par cette douceur et le désir de la sentir à nouveau. Je crée en moi cet espace où se lovera notre amour qui, bien arrosé de mon imagination, forcément fleurira, contre vents et marées et situations clairement adverses.
- C’était vraiment bien… Je souris et je l’embrasse alors que je m’en vais, je lui dis que je l’aime et je le remercie pour tous ces délicieux moments partagés. Je prends soin de me combler de toutes ces instants intenses et joyeux, comme quand la séance de ciné est terminée et que j’en ai encore plein les yeux, que je me lève, que je remets mon manteau et que j’emporte avec moi encore sur le chemin du retour ce plein d’émotions qui m’ont fait vibrer pendant quelques heures. Je souris. C’était vraiment bien. Je ferme la parenthèse.
Je DÉCIDE de prendre la deuxième option. Et en fait, c’est très simple. Je m’étonne moi-même… Je repense aux frustrations vécues avec Dani, et je me dis qu’en fait la clé est véritablement de DÉCIDER au bon moment de limiter ses émotions à un creuset adapté. Adapté aux circonstances, aux possibilités de bonheur, toujours mesurées à la probabilité de frustration corollaire. Ce n’est pas parce qu’on est capable de supporter une frustration qu’on est dans la situation qui convient. C’est complètement débile… sans doute encore un héritage de notre culture judéo-chrétienne et son porisme : souffrir c’est bien.
En fait, ça va sans dire (mais ça va mieux en le disant) : non, ce n’est pas bien 😅
Avant je me disais que la douleur était inévitable, mais que la souffrance était un choix. Eh bien dans cette situation là, je crois que même la douleur est évitable.
Alors circoncire ses émotions ?
Oui. Effectivement. Mais pas les limiter. Je leur laisse libre cours, je les ressens et les exprime dans toute leur largesse et leur puissance. Mais je les cadre. Je ne les laisse pas déborder là où je SAIS par avance qu’elles n’ont pas l’espace suffisant pour s’exprimer sans trop de frustration, frustration qui se transformerait inexorablement en douleur, voire en souffrance.

Je repense aux discussions que j’ai pu avoir avec Sergí et avec d’autres sur les relations libres : l’effervescence des rencontres, le danger du risque de s’y perdre… et je comprends maintenant aussi cette extraordinaire possibilité que nous avons de décider et de se laisser aller à la fois, de faire de notre vie émotionnelle ce que nous voulons, tout en s’autorisant à se laisser bousculer par celle-ci.
La vie est belle 😍

*Jeu de memory : Toutes les cartes sont étalées faces cachées sur la table. Un premier joueur retourne deux cartes. Si c'est la même image qui apparaît sur les deux cartes le joueur gagne les cartes et en retourne à nouveau deux. Si les deux cartes ne vont pas ensemble, le joueur les replace face cachée à l'endroit exact où elles étaient, et c'est au joueur suivant de retourner deux cartes.
Celui qui a une bonne mémoire se souviendra de l'emplacement des cartes déjà retournées et pourra les utiliser lorsqu'il en aura besoin pour compléter une paire.

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